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Entretenir la peur

Journalistes : Nina Di Battista, Laure Blachier, Thomas Le Hetet, Maxime Grimbert ; Montage : Nina D., Laure B., Thomas L. ; Site web : Maxime G - Master JGen 2016

Le contrecoup des attaques terroristes, tout le monde l’a vécu différemment. Si certains s’efforcent de continuer à vivre même dans la peur, d’autres ont tendance à fuir. Ceux là sont en état de choc intense. La vision répétitive des images d’horreur retransmises par les médias les amène inconsciemment à changer leurs habitudes. Ils étaient nombreux, en novembre dernier, à avoir arrêté de prendre les transports. Selon FranceTV info, après les attentats de Paris, la RATP a enregistré une baisse de fréquentation de 10%. Ce sentiment de peur est légitime. Déjà désemparés par les évènements, les esprits ont ingéré les paroles de la classe politique.


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La semaine qui a suivi les attentats de Novembre, ils se sont exprimés: « Il faut écraser Daech », dira Alain Juppé.  « La guerre est parmi nous », scandera François Fillon. Au PS, Jean Christophe Cambadélis, le secrétaire national du parti, expliquera qu’il soutient « les mesures d’exceptions décidées » (état d’urgence, perquisition NDLR) Chez les écologistes, on exprimera « le besoin de faire preuve de sang froid pour faire face à l’horreur de cette barbarie ».


Dans un contexte de choc déjà amorcé par les attaques terroristes, de telles sorties de la part de la classe dirigeante peuvent risquer de contribuer à l'étblissement d'un climat anxiogène à travers le pays. Manuel Valls lui même a évoqué les menaces du futur, le 19 novembre 2015, devant l’Assemblée Nationale, en marge du débat sur la prolongation de l’état d’urgence. 



La semaine suivant les attentats, les dirigeants politiques semblent donc avoir participé à établir un tel climat de peur. A juste titre ?


Par Nina DI BATTISTA

Le 13 Novembre, à 23h53, François Hollande prononce un discours depuis le Palais de l’Elysée. Il y parle d’horreur, de «neutralisation », de « terrorisme », d’ « état d’urgence ».

Derrière lui, le drapeau français est en berne. Le moment est solennel, chargé d’émotion. Le chef de l’Etat en profite pour annoncer un deuil national de trois jours.

 

Le 14 Novembre, soit vingt quatre heures après les attaques de Saint Denis et de Paris, Manuel Valls apparaît sur TF1 pour une courte allocution. Il annonce : « Nous sommes en guerre ». François Hollande prononcera la même phrase deux jours plus tard, devant les parlementaires réunis au Congrès.

 

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Comme nous l’explique Claire Beyssade, professeur à l’Université de Paris 8 et spécialiste de la sémantique, les mots ont une portée significative. Partant du principe que les discours politiques prononcés dans un contexte extraordinaire sont davantage suivis, les effets qu'il produisent sur le public n'en sont que plus conséquents. Répéter et insister sur le terme de « guerre » ​risque de marquer les esprits. La première trace en est le débat qui a pris place ensuite pour savoir si, effectivement, la France était en guerre.

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